Une certaine campagne publicitaire proposait d’écrire le nom d’un être cher sur le calendrier, pour être bien certain d’aller donner du sang à la date prévue. L’idée marketing derrière l’image était plus que valable. Plusieurs études parlent de l’effet d’entraînement lorsque qu’une amie peut nous tirer, dans son sillon d’action. La motivation prend alors son sens et le popotin suit alors bien souvent les influx nerveux du système central. Il y a bien aussi un dicton qui dit qu’à deux, c’est mieux. Que l’on penche donc pour la science ou pour l’expression populaire, peu importe. L’important est que la magie opère et que le corps se décide se mettre en action. Les hormones du plaisir finiront bien par libérer leur nectar et convaincre ainsi la personne que sa décision de bouger était la bonne. Mais si la nécessité d’une pression extérieure est nécessaire pour se mettre en train, est-ce à dire que nos seules sources de motivations sont extrinsèques?

Premier constat: je ne veux absolument pas dépendre de l’extérieur pour me hisser dans mes running shoes et me rendre au gym. Tout le monde le sait, si nos seules sources de motivations proviennent d’éléments extérieurs, la poursuite de nos objectifs ne survivra pas très longtemps. Mieux vaut piger vers des éléments intérieurs, donc intrinsèques, pour atteindre nos objectifs et conserver de bonnes habitudes. Ah oui? Et si la littérature en parlait autrement qu’en terme de dualité, de noir et de blanc, de « gentil » et de « méchant »?

Je suis tombée sur un test à faire, à titre de sportive, quant à ma motivation. Fervente admiratrice des « petits tests », je me suis lancée sans trop regarder. Je savais tout de même que j’avais affaire à une échelle bâtie par des étudiants à l’UQAM, souhaitant mesurer la motivation sportive. C’est donc les yeux brillants de naïveté que je me suis mise à encercler différents chiffres sur ma feuille, au regard de mon appréciation vis-à-vis chaque énoncé. Certaine de « péter des scores », (tout le monde le dit (c’est qui ces « tout le monde »), je suis un exemple motivationnel!) j’ai pourtant presque recraché ma gorgée de café matinale en analysant les résultats…

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Certes, toutes les affirmations coïncidant avec la motivation « suprême » selon le continuum de la théorie de l’autodétermination, sont belles et bien ressorties avec grand éclat. Soit. Aucune stupéfaction radicale ici… Je suis motivée intrinsèquement par les possibilités d’accomplissement associées à l’entraînement. C’est la deuxième partie qui a causé un certain émoi à mon égo. Mais que diantre pouvait bien signifier l’expression « motivation introjectée« ? J’avais tout de même un résultat très élevé correspondant à ce mot, mais aucune idée à quoi le relier. Injection? Auto-injection? Auto comme dans moi-même? Comme dans intérieur? Comme dans intrinsèque? Bien que logique comme argumentaire intérieur, n’en demeure pas moins que mon allié logistique avait tout faux.

La motivation introjectée est une des quatre composantes de la motivation extrinsèque. Quoi? Je ne suis pas exclusivement blindée et bardée d’une ceinture infinie de motivation intrinsèque? Moi, je prends en considération des éléments externes? Hummm… Sylvie Piché, dans son étude « Précurseurs motivationnels des performances sportive et scolaire », réalisée à l’UQAM en 2003, (http://archimede.bibl.ulaval.ca/archimede/fichiers/20726/ch02.html#d0e110) explique que l’individu atteint « d’introjectrite » (permettez-moi de rigoler un peu et d’inventer un mot!), se sent obligé d’agir. Il peut rapidement se sentir coupable s’il ne pratique pas l’activité de prédilection. Le préfixe « intro » vient bien d’une intériorisation, mais des éléments auparavant extérieurs à lui-même. La personne intègre le comment du pourquoi, ce qui influence ses actions. Mais ce qui était extérieur devient intérieur. Que va-t-il se passer si je ne vais pas m’entraîner? Je vais engraisser? Je vais perdre mes capacités? Je devrai recommencer du début? Je serai moins en forme? Ainsi expliqué, je plaide coupable. C’est tout à fait moi. C’est ce qui fait que je me sens parfois si fatiguée, mais totalement incapable de ne pas m’entraîner. Voilà, c’est dit.

Par contre, au lieu d’angoisser sur cette terrible information, j’ai été étrangement soulagée. Si de tels mots sont couchés sur le papier de cette chercheuse (et de bien d’autres!), cela signifie que je ne suis pas un être étrange et biscornu? Je suis un humain complètement normal, qui a des semblables, d’autres hurluberlus qui pensent comme lui? Je ne suis pas la seule écervelée de la planète? Ahhhhhhhhhhhhhh… Joie!

Je suis donc, encore une fois, un être de contradictions. J’intègre presque parfaitement deux composantes opposées. Je suis intrinsèquement parfaitement motivée, mais définitivement, et parfois laborieusement, extrinsèquement motivée. Et alors? Je fais quoi avec cette information?

Je réfléchis et je trouve le moyen de quitter le côté sombre…

Si j’ai pu simplement ENFIN comprendre un mécanisme personnel, je me suis aussi enrichie d’un fabuleux savoir. En effet, on ne place plus exclusivement la motivation intrinsèque comme étant l’ultime et nécessaire type de motivation pour persévérer. Étroitement liées, toutes les raisons demeurent intégrées de façon superposée. Dans la théorie de l’autodétermination, le score global est pris en compte. Le but ultime demeure tout de même l’atteinte de l’autonomie sportive: choisir ses objectifs, croire en ses moyens, voir à travers nos lunettes sportives, discuter de ses inquiétudes, avoir un bon support, donner de la liberté à nos décisions, choisir, de façon libre et autonome, de s’entraîner.

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Vallerand, dans plusieurs de ses études, mentionne que la motivation intrinsèque (où l’activité est pratiquée par besoin de connaissance, de stimulation ou d’accomplissement), n’est pas le seul type de motivation qui peut mener à l’atteinte de l’autonomie et la persévérance. Deux des quatre types de motivation extrinsèque peuvent tout aussi bien remplir une telle fonction: la régulation identifiée (je déteste faire des squats, mais ils m’aideront à mieux courir. Alors je choisis de faire des squats) et la régulation intégrée (j’ai une course demain, alors je mange bien ce soir et je ne sors pas avec mes amis). La régulation introjectée (il faut que je m’entraîne) et la régulation externe (je cours uniquement pour gagner des médailles) ont tendance à faire piquer du nez nos objectifs, à rendre l’activité moins agréable, plus contraignante.

La question existentielle derrière ces deux derniers paragraphes: peut-on passer de l’un à l’autre, faire des allers-retours d’un type à l’autre? Disons qu’un passage vers le négatif s’effectue plus facilement. Mais un petit travail de représentation mentale est de mise pour retrouver le plaisir et migrer vers un type de motivation plus « intégrée et accomplie ». Un tel travail de transfert peut s’effectuer. La responsabilité appartient par contre à chaque personne de débrousailler ce champs de bataille! L’ombre passe parfois à travers notre motivation. Mais de savoir que la lumière peut revenir est suffisant pour me remonter vers la ligne absolue de l’accomplissement! Dans un prochain article, j’analyserai une multitude de trucs motivationnels. Mais chose certaine, Karine Champagne en conférence, ça donne un « high »! Allez-y, osez!

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