Manger. C’est pourtant un geste simple, usuel, doté d’un bon sens immuable et absolument essentiel. C’est un des trucs qui revient inlassablement. Amené ainsi, c’est d’une simplicité désarmante. Pourtant dans le quotidien, c’est souvent une toute autre paire de manche – pour ne pas dire de céleri, d’aiguille, de médias ou d’estime de soi.
Nous sommes gavés tous les jours de corps féminins frôlant la maigreur extrême, ne démontrant vraisemblablement le concept «d’être en santé». Malgré cet état de fait, c’est encore cette image qui prévaut lorsqu’on parle de beauté et du corps «parfait», s’il en est un…Des pas sont faits, puisque même Barbie change de mensurations. Pourtant, ce stigmate est encore bien présent. Mais pourquoi est-il si tenace? Ici, c’est parfois la privation pour maigrir.
Et puis s’amène en trombe le phénomène des chirurgies esthétiques, qui touche de plus en plus de femmes, et même d’homme, de tous les âges. Tous souhaitent correspondre à un idéal de beauté et de jeunesse qui, semble-t-il, ne peut être atteint autrement que qu’en passant par un bistouri ou une aiguille. C’est uniquement dans la tête que ces idées se propagent? (Bruits de criquet) … Je doute que ce soit la seule raison… Assurément, une partie passe par la vision sociétaire, les médias, la mode, la culture… Plusieurs initiatives sont mises de l’avant pour lutter. Parfois même par de jeunes, de très jeunes fille. Chapeau! Là, c’est la chirurgie pour être belle, parfois pour pouvoir continuer de manger.
Si pour certaines, ça reste «superficiel» et rattaché à l’image extérieure projetée, pour d’autres, c’est beaucoup plus que ça. Le problème dépasse l’encéphale et déborde les frontières crâniennes. C’est un état profond de malaise dans le corps, l’âme et l’esprit. C’est le désamour de soi, l’estime personnelle qui pique une course jusqu’à son propre enterrement… Au-delà de la couche épidermique de premier niveau donc, s’élèvent les maladies associées à l’alimentation : anorexie, boulimie, orthorexie, bigorexie, hyperphagie et j’en passe. Manger devient alors à la fois synonyme de récompense et de punition. On est ailleurs que dans la «maladie pour être jolie». Ici, c’est ancré beaucoup plus loin et ça outrepasse le concept de beauté.
Comme si cette réalité n’était pas suffisante, les maladies terribles – lire ici les cancers – frappant la «société moderne», viennent allumer une autre mèche alimentaire difficile à cerner. On parle alors d’alimentation pour éviter le cancer : couleurs dans l’assiette, variété, protéines animales versus végétales… Difficile parfois de s’y retrouver puisque souvent, si l’un dit vert, l’autre dit orange. Et puis encore, si un spécialiste affirme que X est «anti-cancer», alors un autre érudit qualifiera le même X «d’engraissant». Mais que devons-nous donc avaler, finalement? Maintenant, c’est quoi manger pour être en santé.
Se conjuguent alors ici différentes notions se rapprochant l’une de l’autre, mais apportant chacune leur saveur particulière. Ainsi, on marie alors beauté, avec idéal de beauté. On parle de représentation de la santé, mais pour glisser lentement en direction de la maigreur. Une fois tout ceci déposé sur la table, quelle est la marche à suivre pour digérer la réalité quotidienne qu’est celle de devoir manger? Nous sommes face à une problématique de société autour d’une condition pourtant essentielle à la survie : MANGER.
Au final, il s’avère intéressant de rassembler, pour mieux les distinguer, ces concepts qui tous ensembles, emboîtent le pas vers la valse de la remise en question collective. Constat donc pour emporter : un ménage collectif s’impose. Pourquoi? Pour savoir manger, tout en étant en santé, sans toutefois se priver, ni tomber dans l’excès maladif ou chirurgical, tout en soignant son image corporelle, en vue d’un équilibre mental et social qui sera tout, sauf précaire. Défi sociétaire, qui se reflète pourtant quotidiennement dans la singularité de chaque être humain, en quête d’absolu…
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